vendredi 14 janvier 2011

Air(e) de retard
Alain Bernardini
Exposition d'Alain Bernardini, à la base d'Appui d'Entre-deux,
du 13 novembre au 18 décembre 2010
http://www.entre-deux.org/
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Don d'accès.

Prenez position, le retard des uns fait le retard des autres. Soyez pour une fois un retardateur.
Retardateur et non retardataire. Actif et non passif.

Pas de fioritures inutiles, cadrage simple, lumière en aucun cas idéaliste, le ciel y est même nuageux et grisâtre. 
C'est aux abords d'autoroute plus que communs et devant des devantures métallisées de hangars en activité qu'Alain Bernardini nous donne rendez-vous. Un rendez-vous plutôt atypique doit-on dire. 
Imaginez-vous ouvrier, cadre supérieur, attaché commercial, plombier, électricien ou que sais-je encore. Sortant de votre domicile, point A, vous arborez fièrement votre tenue de travail pour vous y rendre sans tarder, point B. Maintenant imaginez un lieu de transition, un lieu qui vous invitera à prendre du retard sur une aire prévue à cet effet, point C. Etrange dîtes-vous? Quoi de plus normal pensez-vous. Pourquoi voudriez-vous prendre du retard ? Eh bien le photographe Alain Bernardini a travaillé sur la question. Il invite des ouvriers et salariés d'entreprises diverses de la région à prendre ce délai  et à le déguster sur un canapé.

Regarder un film quelques minutes au bord d'une route, s'adosser à une voiture en contemplant le ciel, écouter de la musique ou bien encore ne rien faire, le tout agréé par un panneau de signalisation mobile "air(e) de retard". Un panneau pouvant se mouvoir, s'incruster et se placer où bon son commanditaire lui semblera. Un espace se crée alors, un espace qui tient entre ses mains un enjeu de société. Alors qu'aujourd'hui le monde du travail nous asphyxie de règles déshumanisantes et déshumanisées, l'artiste tend à bouleverser ces codes en invitant les premiers concernés à réaliser la révolution du retard. Un retard qui n'a aucune valeur au sens juridique du terme mais empreint de saveurs.
Le temps prend alors une autre dimension, il se détourne de sa fonction première.
On prend son temps, on s'arrête, on regarde, on observe, vous savez ces choses dont vous n'avez plus le temps de faire entre le matin et…le matin. Ici que nenni. On prend le temps de respirer et on jouit des choses simples que le monde du travail tend à nous obstruer de plus en plus.


Aurélien Guitard

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