samedi 27 novembre 2010


Cold Comfort – Rune Guneriussen
Galerie Mélanie Rio
Nantes











                               Entrée dans une pièce sombre. Première photo, très grand format elle s'impose à nos yeux. Entre nature et culture, je m’y perds, à la fois envoûtante et pleine d'interrogation. Ces livres qui grimpent autour d'un arbre comme du lierre ou ruisselant dans la verdure, cette culture envahissante est-elle notre futur air vital ? Est-ce un arbre sur lequel poussent des lampes ou des lampes posées là pour magnifier l'arbre ?
                               J'oscille entre contemplation et rêve, une sensation de calme. La rêverie se poursuit, une autre salle s'offre à moi, des photos de nuit. Le rapport de la nature et des éléments de la vie quotidienne (lampes de bureau, chaises en plastique...) se fait dans une autre tonalité, une autre lumière, plus intime. Je tourne, je rêve, je m’y perds. Pourtant je ressens comme une grande solitude. Personne. Une galerie froide, blanche, dans la photo un bleu profond. Une intimité suggérée mais avec tellement de distance, un intouchable, une invention venue d'un songe qui est bien inexistante. Il s'en dégage une pensée profondément poétique mais est-ce vraiment le propos ?
N’est-ce pas un appel à la réflexion sur le rapport entre l'être humain et la nature ? Dans une actualité où les questions sur le développement durable et l'écologie font chaque jour débat. Ces photo sont elles des poubelles magnifiées ? Vielles lampes accumulées et envahissantes. S'impose une dualité entre poésie et actualité politique et sociale.

Laureen Dupuis


 

Comment faire danser un carré.


Depuis 1950, le déroulement de la peinture
Judit Reigl
Musée des Beaux Arts de Nantes
9 Octobre 2010 – 2 Janvier 2011











Guano 1958-1962




 Une foule à l’affût,
Un rythme

Marche presque solennelle
Danse intemporelle

Espace partagé,
dans l’intimité

Ecouter la couleur, sentir la forme

Espace et picturalité
Le passage de la peinture
Continuité
La trace, visible
et cachée
Saisissable à l’instant même
Tactile

Le trait, perceptible,
temporel, corporel
Impénétrable
Immatérialité diaphane

Verticales
Absence, vide, emprise

L’Horizon
Une ligne, des points

Deux rectangles

Danse

Tonalité bleutée
Note teintée

Résonnance

Inhérence

Indolence

Silence

Le mouvement s’accélère,
Amplitude sensible

Tension, interaction, commutation

Effleurement viscéral

Divergence, assonance, turbulence


Glissements impulsifs
Troubles corrosifs

Empreinte
Etreinte

Décharge furtive
Surcharge vive

Creusement
Recouvrement

Dissonance
Résistance

Surgissement

Épuisement de la matière,
de la surface toute entière

Saturation

Dispersion


Hydrogène, photon, neutrinos 1984-1985


 AUROUSSEAU Pauline

jeudi 25 novembre 2010

Renaissance contemporaine


  De fond en comble 
Max Charvolen et Suzanne Hetzel
Centre International d’Art Contemporain de Carros,
18 septembre / 31 décembre 2010. Entrée libre.








Elle, enregistre les travaux, minutieuse et attentive ; elle fixe sur papier glacé les vestiges de cette demeure massive, les fastes déchus de la forteresse. Ils sont des voisins, des ouvriers, jeunes, moins jeunes, tous venus prêter main forte à la renaissance de la bâtisse. Ils fixent l’objectif d’un regard inquiet. Telle une véritable archiviste, elle répertorie chaque pièce, donnant à chaque objet « sa place ». Pas d’enjolivure, pas de fantaisie, mais un œil juste et pertinent, analyste et rigoureux. Il s’agit de ne pas trahir l’espace dans lequel elle évolue, et de garder trace de cette ruine éphémère.

Il, invite à parcourir des pièces anguleuses, des espaces recomposés par la couleur. Il moule, il encolle, recouvre de pigments. Là un escalier, là une porte, là un couloir. Les lieux de passage, marqués par des traces de pas, aux endroits où la toile est encore vierge. Il arrache cette deuxième peau au château branlant, la retend, invente un nouvel espace. Il vient nous parler d’une géographie des choses, ce qui a été là, ce qui va disparaître après les travaux.

Deux artistes en résidence. Suzanne Hetzel et Max Charvolen. Un alliage solide face au temps. Ils nous invitent à garder la mémoire d’un lieu soumis au changement. C’était un château. Ce sera un musée.

Marie GRIER





Château de Versailles, Takashi Murakami
Du 14/09 au 12/12













Takashi Murakami, l'un des artistes phare de la scène internationale, présente son travail dans les appartements royaux du Château de Versailles.
Cet événement est la première grande rétrospective de l'artiste japonais en France, il y montre ses sculptures, peintures et vidéos, dans quinze salles du Château ainsi que dans son parc.
Troisième artiste contemporain à exposer au Château de Versailles, après l'américain Jeff Koons en 2008 et le français Xavier Veilhan en 2009, (la démarche étant d'alterner chaque année artiste étranger et artiste français) Murakami développe ici son univers au sein du Château, selon lui : « cette exposition est un bon mariage entre la modernité et l'histoire, c'est mon concept ».
Deux des œuvres présentées dans l'exposition ont été créées spécialement pour le lieu : la moquette dans la dernière salle ainsi que l'immense bouddha doré dans le jardin.

Ces trois premières expériences d'introduction d'un artiste contemporain dans ce patrimoine exceptionnel ont en commun d’inviter des artistes de notoriété internationale dans le monde de l'art et présentant un travail dit pop, kitch et monumental.
On peut donc se demander pourquoi n'exposer ici que des artistes à la notoriété bien établie et non de plus jeunes ou tout simplement moins célèbres créateurs, ce à quoi Jean-Jacques Aillagon le président du Château de Versailles répond : « Les institutions consacrées à l'art-contemporain ont pour mission d'explorer la réalité artistique, de découvrir de nouveaux artistes et talents, alors que Versailles a pour mission de confronter les œuvres présentées au décor du Château, à son cadre et donc la notoriété de l'artiste doit être suffisamment établie pour résister à la notoriété de Versailles sinon l'exercice serait extrêmement déséquilibré ».
Ces opérations ayant pour but d'amener un public différent dans ce monument parmi les plus célèbres au monde font suite au programme de grands travaux de rénovation du Château lancés en 2003 grâce aux mécènes et dûs à la volonté d' Aillagon pour que « le patrimoine (soit) vivant et ouvert à la culture de notre temps ».

Cependant ce mélange des époques et des cultures ne trouve pas grâce aux yeux de tous comme nous avons pu le constater en voyant la récente couverture du magazine « Valeurs Actuelles » montrant une œuvre de Murakami dans le Château et titrant : « Art-contemporain : le temps des bouffons » et un article intitulé : « Le triomphe du canul'art ». S'ajoute à cela une manifestation devant la grille du château d'une cinquantaine de personnes d'extrême-droite souhaitant selon eux dénoncer la « pauvreté » du travail de Murakami et de l'art contemporain en général.

Ce qui est intéressant ici c'est particulièrement le dialogue entre des œuvres d'aujourd'hui et celles du passé, comme le souligne le commissaire de l'exposition Laurent Le Bon : « Il y a plein d'esprit dans ce travail, on le voit à la manière dont les œuvres de Murakami jouent avec les statues de Louis XIV. Dans la salle du Sacre de Napoléon, il a posé la sculpture d'un roi nu et énorme sorti d'un conte d'Andersen et revisité à la sauce manga. ». Bien que quelques œuvres semblent dénoncer une certaine société de consommation, ce qui vient à l'esprit est le caractère de business-artiste qui convient parfaitement à Murakami (dont le prix des œuvres a centuplé depuis 1993) et au vu des très nombreux produits dérivés se vendant (très chers) à la sortie de l'exposition.

Cette expérience reste très intéressante surtout pour percevoir Versailles non pas comme un objet inventé en une seule fois mais comme quelque chose qui ne cesse d'évoluer depuis ses différents occupants, comme un lieu ouvert aux créateurs de chaque époque, même si l'on peut douter de ce que Jean-Jacques Aillagon dit à ce sujet : « Louis XIV aurait été très séduit par cette démarche. ».

Quentin Blaise-Nicolas